Rachmaninov à Moscou avec Denis Matsuev

April 5 2013

A l’occasion des 140 ans de la naissance de Rachmaninov, la philharmonie de Moscou, l’orchestre symphonique d’Etat de Moscou et la salle Tchaïkovski offraient au public, deux soirées de prestige : Denis Matsuev, la grande star russe du piano, était dirigé par Leonard Slatkin dans des programmes évidement consacrés au grand compositeur. C’était également l’occasion pour Matsuev de présenter son dernier disque, naturellement consacré à Rachmaninov et à son Concerto n°2.

 

Adulé du public moscovite qui lui réserve un accueil des plus enthousiastes avant de le couvrir de fleurs, Denis Matsuev osait affronter, sur un même concert, les deux concertos de Rachmaninov les plus célèbres : les Concertos n°2 et n°3, sorte de soirée orgiaque à laquelle peu de pianistes oseraient se confronter. Bien évidement Mastuev combine la technique et la puissance digitale pour transcender ces deux partitions. Pourtant, le pianiste peine un peu à entrer dans le Concerto n°2. En dépit d’une aisance et d’une dynamique toujours phénoménales, Matsuev semble un peu sur la réserve, quant à Leonard Slatkin, il impose un accompagnement attentif et assez souple, en dépit d’une salle à l’acoustique très généreuse, qui fait étinceler la masse orchestrale. Changement d’ambiance avec un Concerto n°3 porté par une électricité  indubitable.  Soliste et chef font bloc pour imposer une lecture échevelée du concerto, transcendé par des musiciens touchés par la magie des très grands soirs. La force dramatique traverse cette interprétation qui prend place dans la droite ligne des lectures des grandes figures légendaires du piano.

 

Le lendemain, Matsuev affrontait, les « modestes » (par la durée), Variations sur un thème de Paganini.  La technique et la variété de touchers du pianiste russe sont évidemment à leur affaire dans cette succession de saynètes et de climats. La force de Matsuev réside dans cette maîtrise technique qui se joue des difficultés, mais le jeu du pianiste est complété par une vision supérieure des enjeux de la partition et de sa construction.

 

Bien connu et apprécié au public français, Leonard Slatkin est directement lié et attaché à la musique de Rachmaninov. Son grand-oncle, le violoncelliste et chef d’orchestre,  Modest Altschuler, avait fondé, à New York, en 1903, la société symphonique russe.  Rachmaninov en avait été un invité régulier.  Discophage émérite, Leonard Slatkin a également gravé deux intégrales des Symphonies de Rachmaninov, à Saint-Louis (Vox) et à Détroit (Naxos). Dans la Symphonie n°2, il donne le pleine de son expérience et de sa vision interprétative. Le chef cherche à imposer un Rachmaninov brillant, mais jamais mielleux et vulgaire. Sa direction, ultra-précise, fait ressortir  la richesse instrumentale et harmonique de l’œuvre. L’orchestre moscovite, encore très typé dans ses sonorités, se surpasse pour faire triompher la partition.  Slatkin, qui n’était pas venu à Moscou, depuis 1974,  est longuement acclamé par un public comblé par ses concerts.

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